dificile de remonter une grosse concession

Par faustek – le 06/10/07 à 01h56Divers

La partie entre Serge Minaux et Arnaud Cordier du CDF 2007 n'est absolument pas spectaculaire.

Pourtant, d'un point de vue stratégique, c'est une partie spécialement instructive. A mon avis, c'est la victoire la plus techniquement valable d'Arnaud avec sa partie contre G. Delmotte.

Dans l'ensemble, malgré les faiblesses que je vais exposer, Serge fait une partie à la fois propre et solide. Comme on sait, la valeur de l'opposition donne un éclat supplémentaire à la victoire.



PREMIERES QUESTIONS AU 17e TEMPS


Trait aux blancs


En déroulant la partie, je me suis posé la question rituelle : quelle couleur je choisirais ?

Aucune pour le moment, même en termes de goût, je ne perçois aucune implication justifiant une préférence.


17. 42-38 ?


Je me suis dit: ceci est une fantaisie qui oblige inutilement à effectuer un tour d'horizon serré, perdant du temps et de l'énergie, sans contrepartie.

Je me trompais légèrement : ce n'est pas seulement une fantaisie, c'est le premier coup faible de la partie.

17. ..... 16-21 !
18. 27X16 18-22

C'est parti ! Arnaud n'est pas comme le héron de la fable. Il voit en début de partie la possibilité de prendre quelques temps d'avance et il décide de les prendre, même si cela renvoie les tensions à plus tard.

Les temps d'avance ici sont renforcés par la position du pion 16 qui a vocation à être échangé au moment choisi. Mais le forcing ici peut aboutir à sept temps d'avance ou à 13 temps d'avance, selon les options acceptées par les blancs.




19. 39-33 ?

Une autre grosse concession ! Serge choisit une option de marche arrière de toutes ses divisions, concédant d'un coup 14 temps au lieu de 7 aux noirs. J'imagine que ce choix est délibéré. Serge se dit sans doute que les temps n'ont qu'une importance relative en début de partie et qu'il les reprendra ensuite. Mais il se dit surtout qu'il faut choisir l'option qui limite le plus longtemps possible les possibilités de tension.

C'est dommage puisque le coup naturel (4-10) aurait laissé une position à la fois plus équilibrée mais aussi mieux structurée, tout en limitant les tensions. La concession que vient de faire Serge dans le but d'alléger les tensions et de se donner le temps de voir venir Arnaud va lui coûter cher à cause de son ampleur ! Il ne parviendra plus jamais à reprendre les nombreux temps concédés et la lourdeur constituée par le pion 45 et son environnement resteront des handicaps jusqu'à la fin de la partie. La réoccupation du centre qui semblait pouvoir se faire aisément à n’importa quel moment sera aussi contrariée de bout en bout.

Du coup, même lorsqu’Arnaud commet des approximations, la nécessité de regagner quelques temps ou de reprendre le contrôle central aveugle un peu Serge !

C’est là que se trouve la clef de la partie !



19. .......22-27
20. 32X21 23X21
21. 47-42 17X26
22. 36X47 12-18



GROS RETARD EN TEMPO ET DESEQUILIBRE AU 23e TEMPS


Trait aux blancs


On voit immédiatement la faiblesse des blancs : une partie ouverte avec des temps de retard et une lourdeur. Mais rien n’est décisif.

Quelle stratégie choisir ?

Dans un premier temps, Serge allège la lourdeur de son dispositif en mettant en jeu le pion 50 qui va monter vers la case 39; pendant ce temps, Arnaud commence à tenter de mettre en place un verrou central et il échange le pion 16, comme prévu.

Voici la nouvelle position au 26e temps, trait aux blancs



Trait aux blancs




26. 42-37 ! 18-22 ?

Le coup joué par Serge me paraît excellent dans la mesure où il permet ensuite de jouer 48-42 pour verrouiller défensivement l'aile gauche des noirs et se donner le temps de rééquilibrer la partie.

En revanche, le coup d'Arnaud me semble faible techniquement. C'est sans doute un mouvement psychologique. En effet, pour très longtemps, la voie est bouchée sur l'aile droite des blancs. De plus, 18-22 est complètement inutile, surtout qu’il est difficile de développer le pion 13 compte tenu des menaces de combi. Le coup ne peut pas servir à attaque l'aile : 15 temps ne suffiraient pas à emmener des renforts menaçants. Il ne peut se justifier pour la maîtrise centrale : si les blancs se contentent de jouer 48-42 puis 49-44, ils prendront durablement le contrôle du centre...

En réalité ce mouvement est psychologique; une provocation qui peut conduire les noirs à réagir maladroitement. C'est d'ailleurs ce qui va se passer.

Trait aux blancs


27. 38-32 ?


Pourquoi étoiler son jeu alors que l'on a besoin de le structurer afin de mettre en place des formations de pionnage destinées à rattraper les tempos et à désenclaver la pièce 45 ? La seule justification que pourrait avoir ce mouvement est le tenté de faute 13-18 qui aboutirait à une dame. Mais elle est trop chère.

A ce stade, Serge aurait dû se montrer plus patient et envisager carrément un contre-jeu. Dans cette optique, il aurait pu jouer le coup naturel 48-42 qui n’a que des qualités ! Il permet de construire un bloc indestructible, surtout si on a l’idée de le compléter ensuite par 49-44. En plus c’est un excellent tenté de faute qui, dans l’hypothèse d’une suite du type 13-18 donnerait le gain aux blancs. Du coup, un tel mouvement priverait amplement les noirs d’une partie de leurs options !




27. …… 13-18

Les noirs semblent décidés à accélérer l’occupation du centre. Je pense que ce mouvement est un peu précipité.

28. 49-44 ? 22-27 !

Pourquoi des choix si chargés ? Les blancs sont déjà moins équilibrés que les noirs, pourquoi aggraver ce déséquilibre ? Oui, pour tenter de reprendre le contrôle du centre. Oui, mais il faudrait y aller sans à coup. Il s’agit pour moi d’un coup faible qui va encore plus obliger les blancs à jouer de manière précise.

Les noirs qui n’en demandaient pas tant sautent sur l’occasion pour renforcer leur centre ! Les 4 ou 5 temps qu’ils perdent importent peu : ils avaient une quinzaine de tempo d’avance, il en reste une dizaine.






Le 33e temps est étonnant, trait aux blancs

Trait aux blancs



Les noirs venaient de jouer 32. .... 19-33 ! Ce petit coup vicieux introduit une menace de combi qui empêche de jouer 37-32 en vue d'un échange simplificateur 2X2.

Les projets des blancs s'en trouvent contrariés.

33. 43-39 ?

Maintenant, il y a un début de panique chez les blancs qui veulent rapidement essayer de dégager les noirs du centre.Mais pourquoi alourdir encore plus ce flanc droit des noirs ?

et ils commencent à paniquer.

Passons au 37e temps


Trait aux blancs



La situation est devenue très difficile.

37. 34-29 20-24
38. 29X20 25X14 !

La prise met hors jeu, pour très longtemps, les pièces 35,39,40,44,45.


Après quelques tentatives vaines de brouiller les cartes, les blancs abandonnent.

Réponses

Par faustek – le 06/10/07 à 01h57

"difficile", c'est mieux