Un surprenant début de championnat. Tout d’abord la combinaison ultra classique dans ce genre de position, laissée par Martijn van IJzendooorn contre Wouter Wolff, ensuite la position de mat dans laquelle se retrouve ce dernier contre Alexander Shvartsman et enfin le gain ultra simple auquel Alexander Baliakin ne pense pas contre Evgeni Vatutin. Pendant ce temps, Alexander Georgiev bataille durement contre ses adversaires, sans que ceux-ci ne lui fassent la moindre concession.
Mais le plus intéressant est ailleurs. On voit se dessiner deux formes de duels, l’une reposant sur la technique et le calcul et l’autre sur la psychologie et la créativité. La partie livrée par Joël Atse contre Martijn van IJzendooorn est de ce point de vue remarquable. Joël fait le pari de n’utiliser que quelques minutes sur son temps de réflexion. Son adversaire a mal géré son propre temps de réflexion et s’est retrouvé en zeitnot au moment le plus important. Et là, Joël a exploité son esprit créatif pour décontenancer son adversaire. La partie d’Alexander Shvartsman est un peu dans le meme esprit. Alors que la partie prend essentiellement un tournant stratégique, l’ancien champion du monde attend le bon moment pour attaquer au centre et tendre un piège assez machiavélique. Son adversaire, Wouter Wolff, aurait dû alors se méfier. Le cadeau positionnel était trop beau. Tous les clignotants auraient dû s’allumer au rouge. Le cadeau était effectivement empoisonné.
Voyons tout cela de plus près. Tout d’abord, la partie de Joël contre Martijn :
http://toernooibase.kndb.nl/applet/oerterpapplet2.0/oerterp.php?taal=&kl=46&Id=6349&r=2&jr=18&wed=1018706&weda=&zetten=&aav=&view=4&gotoPly=
Trait aux noirs
Position au 20e temps.
La partie a pris un caractère classique. Les blancs ont 7 temps d’avance.
Trait aux noirs
Position au 27e temps
On est toujours en classique, avec cette fois-ci 10 temps d’écart. Par contre le pion central 23 peut vite être sous pression après 27-22 ou 28-22.
27… 8-13
28. 37-31
Après 28-22, les noirs ont un bon gambit positionnel par (24-29) 33x24 (9-14) etc.
Après 27-22 (11-17) 22x11 (16x7) 28-22 le même gambit est encore possible.
En jouant 28. 37-31, les blancs maintiennent la pression et menacent d’exploiter leur avance de développement en effectuant le 2x2 33-29.
28… 9-14
La parade qui force les blancs à prendre 3 pions après 33-29.
29. 48-43 24-29
30. 33x24 14-20
31. 43-39 20x40
32. 35x44 15-20
Trait aux blancs
La partie a conservé son caractère classique et la pression sur le pion 23 s’est atténuée. Les noirs semblent avoir les meilleures perspectives. Pourtant l’analyse montre que ce n’est qu’une illusion. Le conducteur des blancs paraît bien avoir mystifié son adversaire.
D’autant plus que, au niveau du temps de réflexion, la situation est loin d’être idyllique, avec seulement un peu plus de 5 minutes au compteur.
33. 39-34 11-17
34. 38-33 4-9
35. 44-40
Trait aux noirs
C’est maintenant qu’il faudrait du temps pour choisir la meilleure variante. Il ne reste aux noirs que 2 minutes.
35… 2-7
Il y a une manœuvre bien connue qui se présente après la suite naturelle (20-25) 40-35 (9-14) 42-37 (14-20) par 33-29 ! (3-9) 29x18 (13x33) 27-22 (17x28) 32x3.
Cette même idée se présente après la suite plus alambiquée (1-6) 40-35 (2-8) 42-37 (6-11) 30-25 (17-21) 25x14 (9x20) 33-29 ! (3-9) 29x18 (13x33) 34-29 (33x24) 31-26 etc.
36. 40-35 7-11
37. 42-37 ! 1-6
38. 27-22 17-21
Il n’y a pas de moyen de bloquer les blancs par (20-24) 31-27 (9-14) 36-31 (3-9) car les blancs combinent par 22-18 et 28-23.
Après (16-21) 33-29 (11-16) 29x18 (20-25) 22x11 (13x33) 34-29 ! (25x23) 11-7, c’est encore aux noirs de trouver la nulle.
39. 22-18 ! 23x12
40. 34-29 9-14 ?
Comme Stéphane l’a déjà fait remarquer sur le forum, (20-25) donnait la nulle.
Une partie vraiment impressionnante de Joël Atsé, face à l’un des plus forts joueurs mondiaux. Je ne crois pas que ses futurs adversaires s’aventureront sur le terrain du classique lors des prochaines rencontres. Il a démontré sa maîtrise du sujet.
A suivre…